Les Rapporteurs de l’ONU sur la torture s’inquiètent du sort des détenus de Guantanamo remis à l’Algérie

Les Rapporteurs de l’ONU sur la torture s’inquiètent du sort des détenus de Guantanamo remis à l’Algérie

Karam Kara-Békir, Maghreb Emergent, 11 décembre 2013

Depuis son transfèrement en Algérie, Djamel Ameziane n’a plus donné signe de vie, selon les rapporteurs de l’ONU (DR)Les Rapporteurs spéciaux des Nations Unies sur la torture et les droits de l’homme et la lutte contre le terrorisme, Juan E.Méndez et Ben Emmerson, ont exprimé leur inquiétude sur le sort de Djamel Ameziane, récemment transféré de Guantanamo Bay vers l’Algérie, selon un communiqué du Haut-commissariat aux droits de l’homme, rendu public mardi.

Djamel Ameziane a été renvoyé contre son gré par les autorités américaines la semaine dernière vers l’Algérie, en compagnie de Belkacem Bessayeh, un autre ressortissant algérien détenu à Guantanamo. Cette décision a été prise en dépit des mesures de précaution exigées par la Commission interaméricaine des droits de l’homme, demandant aux Etats-Unis de ne pas renvoyer des personnes vers des pays où leurs vies ou la jouissance de leurs droits pourraient être menacés. Car, M. Ameziane, qui a fui Algérie pour l’Autriche et le Canada il y a deux décennies pour échapper à la violence et la persécution, a refusé son transfert vers l’Algérie par craintes de nouvelles persécutions.
« Nous sommes profondément préoccupés que la vie de M. Ameziane soit en danger en Algérie », soulignent les deux experts, qui rappellent des cas antérieurs de retours forcés vers leurs pays, suivis de torture avérée pratiquée à leur encontre.
De son côté, le gouvernement américain dit avoir pris «toutes les précautions diplomatiques pour mener chaque transfèrement en accord avec ses critères et sa politique des droits de l’homme », jugeant ainsi l’Algérie sans danger pour les deux ex-détenus de Guantanamo.

« Les assurances diplomatiques ne sont pas juridiquement contraignantes »

Les Rapporteurs spéciaux ont noté que le gouvernement américain a demandé et obtenu l’assurance d’un traitement humain de la part des autorités algériennes, soulignant toutefois, que les «assurances diplomatiques ne sont pas fiables et souvent inefficaces dans la protection contre la torture et les mauvais traitements, et les États ne devraient pas recourir à eux. »
«Nous avons souvent vu des assurances diplomatiques utilisées par les gouvernements pour contourner l’interdiction absolue de la torture, comme établi dans la Convention des Nations Unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants», ont-ils déclaré. Et d’ajouter : «Les assurances diplomatiques ne sont pas juridiquement contraignantes. Il est donc difficile de comprendre pourquoi les États qui violent les obligations contraignantes en vertu de traités et le droit international coutumier doivent se conformer aux assurances non contraignantes ».
En 2010, les rapporteurs spéciaux des Nations unies sur la torture et sur les droits de l’homme et la lutte contre le terrorisme ont exprimé leur inquiétude par rapport à la décision de la Cour suprême des Etats-Unis de transférer les deux détenus algériens de Guantanamo vers l’Algérie. Les deux experts indépendants ont la charge de suivre la situation de M. Ameziane avec le gouvernement algérien pour assurer qu’il soit traité avec humanité et avec respect.
Les Rapporteurs spéciaux, sont nommés par le Conseil des droits de l’homme basé à Genève pour examiner et faire un rapport sur la situation du pays ou un thème spécifique des droits de l’homme. Les positions sont honorifiques et les experts ne sont pas employés de l’ONU et ne sont pas payés pour leur travail.