La dernière carte ?

La dernière carte ?

par Par K. Selim, Le Quotidien d’Oran, 7 juin 2009

Le discours de Barack Obama sur la question du Proche-Orient, en dépit d’une tonalité positive à l’égard des Palestiniens, est resté marqué par un équilibrisme factice en appelant les deux parties à faire des concessions.

On ne voit pas, bien entendu, quelles concessions peuvent faire les Palestiniens dont les territoires sont occupés et soumis à une expansion des colonies. Le message s’adresse plutôt aux Etats arabes qui, selon le président américain, doivent faire davantage que le plan de paix qu’ils ont officiellement adopté en 2002. En clair, il s’agit de normaliser les relations avec l’Etat d’Israël sans attendre la mise en place d’un Etat palestinien. Ce serait le moyen de mettre «fin à l’impasse», selon le chef de l’administration américaine. Les Etats arabes devant s’impliquer dans «le processus de paix», la reconnaissance ne serait plus la conséquence de la conclusion d’un accord mais un moyen d’y parvenir. La démarche de Barack Obama n’est pas surprenante, il doit tenir compte de la très forte pression du lobby israélien aux Etats-Unis.

Le vrai enjeu est celui de l’attitude arabe. M. Obama n’a pas tort de leur reprocher une certaine passivité, mais l’implication qu’il leur suggère n’est pas la bonne. Si, comme le note le président américain, les Etats arabes ne «sont pas seulement importants politiquement mais aussi économiquement», le drame des Palestiniens est qu’ils ne semblent pas en avoir conscience. Ils ont depuis deux décennies au moins délégué aux Américains le soin de trouver la «solution» et on sait l’usage qu’ils en ont fait. Même les plus pro-Américains des Etats arabes ont du mal à croire que les Etats-Unis étaient des parrains de la paix tant ils étaient activement du côté d’Israël.

Une politique «active» des Etats arabes consisterait à affirmer clairement qu’ils mettraient leurs moyens et ressources au service des Palestiniens et de leur droit à créer leur Etat. La normalisation avec Israël ne peut être acceptée comme un élément du processus de paix – si tant est qu’il existe -, mais comme sa conséquence. Le ministre saoudien des Affaires étrangères, Saoud Al-Fayçal, a parfaitement raison de souligner que les Etats-Unis avaient les moyens de «convaincre les Israéliens d’oeuvrer pour un règlement pacifique» en relevant qu’ils peuvent conditionner l’aide immense qu’ils leur apportent et leur demander d’être «raisonnables». On voit mal, bien entendu, Barack Obama «oser» une telle démarche.

Il faut donc se féliciter que le ministre saoudien ait été catégorique sur le refus de normaliser avec Israël sous prétexte de favoriser une reprise des négociations. «Si nous faisons cela avant la restitution des territoires arabes occupés, nous aurons donné la seule carte entre les mains des pays arabes». Le constat est indiscutable. S’il a le mérite d’être dit clairement, il ne dispense absolument par les Etats arabes de l’obligation de sortir de leur incompréhensible passivité.

Le refus de la normalisation avec Israël n’est pas la seule carte entre les mains des Etats arabes. Ils en ont d’autres qu’ils ont constamment refusé de jouer… Au point de les neutraliser.