La France accueille un autre algérien de Guantanamo

La France accueille un autre algérien de Guantanamo

par Djamel Belaïfa, Le Quotidien d’Oran, 2 décembre 2009

Après Lakhdar Boumediene,un second ex-détenu algérien de Guantanamo, Saber Lahmar, blanchi de tout soupçon de terrorisme depuis plus d’un an, est arrivé, hier, en France, indique l’AFP qui cite un communiqué du ministère des Affaires étrangères et européennes français. Selon l’agence française, le transfert du ressortissant algérien de Guantanamo sur le sol français avait été annoncé lundi soir par son avocat à Washington M. Robert Kirsh.

Saber Lahmar est le dernier de cinq Algériens arrêtés en Bosnie fin 2001 dont un juge fédéral américain a ordonné la libération le 20 novembre 2008, à être effectivement libéré. Il est le second ex-détenu à être accueilli en France. Saber Lahmar est considéré parmi les premiers à avoir été incarcérés dans le centre de détention américain de Guantanamo. Il y aura passé en tout huit ans.

Selon son avocat, M. Lahmar a subi des années d’emprisonnement inhumain, à l’isolement, il était encore séparé de tout contact humain un mois après que le juge Richard Leon eut estimé que sa détention était illégale. M. Kirsh a affirmé à l’AFP que son client «sait où il va vivre et s’est déjà renseigné sur le type de travail qu’il pourrait faire. Il veut reprendre sa vie», a indiqué l’avocat.

Arrêté à l’automne 2001, sous le soupçon qu’il fomentait un attentat contre l’ambassade américaine de Sarajevo, avec cinq autres Algériens, Saber Lahmar résidait légalement en Bosnie, marié à une citoyenne bosniaque. Après des années d’enfermement et une victoire devant la Cour suprême américaine en 2008, les six hommes ont été les premiers à contester le bien-fondé de leur détention devant la justice de droit commun, en octobre 2008. A ce moment, l’administration Bush avait déjà abandonné ses soupçons sur la préparation d’un attentat à Sarajevo. Elle leur reprochait d’avoir planifié un voyage en Afghanistan fin 2001, alors que l’offensive avait été lancée par les USA et leurs alliés après les attentats du 11 Septembre.

Cinq d’entre eux ont été totalement blanchis par le juge fédéral Richard Leon qui a tancé le gouvernement américain pour la légèreté de éléments à charge. Un sixième a fait appel. Après le départ de trois de ses compagnons d’infortune quelques semaines plus tard en Bosnie, puis de Lakhdar Boumediene en France, M. Lahmar avait refusé de retourner en Bosnie au mois de juin.

Il a vécu les derniers mois de sa détention dans le camp Iguana séparé du reste des bâtiments de la prison, où les détenus bénéficient d’une liberté relative. Ayant appris le peu de soutien que le gouvernement bosniaque avait accordé aux autres anciens détenus de Guantanamo, M. Lahmar avait peur de ne pas être bien accueilli, selon son avocat. C’est alors qu’il a déposé une demande officielle à la France.

Lakhdar Boumediene et Saber Lahmar font partie d’un groupe de six Algériens vivant en Bosnie qui ont été arrêtés en octobre 2001, interrogés et mis hors de cause par la police bosniaque, avant que celle-ci ne les livre aux Américains. Ils font partie des premiers détenus arrivés à Guantanamo, en janvier 2002. Le gouvernement Bush les soupçonnait d’avoir fomenté un attentat contre l’ambassade américaine de Sarajevo. Des accusations très vite abandonnées sans que les hommes soient libérés pour autant.

A l’instar de Saber Lahmar, l’autre ex-détenu de Guantanamo Lakhdar Boumediene a été arrêté à l’automne 2001 en Bosnie, où il résidait légalement, il avait été remis aux autorités américaines sous le soupçon qu’il fomentait un attentat contre l’ambassade américaine de Sarajevo. Il avait ensuite été transféré à Guantanamo dans les premiers jours d’existence de la prison. Lakhdar Boumediene a quitté la prison le 15 mai dernier après des années de bataille judiciaire. Il a été autorisé à s’installer en France avec sa famille, faisant de la France le premier pays de l’Union européenne à accueillir un détenu libéré de Guantanamo, qui ne soit ni un résident ni un citoyen français. Avant d’être le premier détenu à contester légalement sa détention, il est aussi celui qui a porté devant la Cour suprême la question du droit pour les détenus de contester leur emprisonnement devant la justice fédérale.

Par ailleurs, un troisième ex-détenu durant cinq années dans la prison militaire américaine de Guantanamo, Ahmed Belbacha, accusé d’adhésion à un groupe terroriste actif à l’étranger, a été condamné par contumace à 20 ans de réclusion criminelle, dimanche dernier, par le tribunal criminel près la cour d’Alger. Détenu dans la prison de Guantanamo depuis février 2002, Ahmed Belbacha avait été arrêté au Pakistan en décembre 2001. Les autorités américaines avaient décidé de le libérer, en février 2007, et accepté de l’extrader vers l’Algérie. Belbacha a refusé cette extradition préférant rester à Guantanamo.