Syndicats-ministère de l’éducation : Le dialogue dans l’impasse

Syndicats-ministère de l’éducation : Le dialogue dans l’impasse

El Watan, 7 février 2015

Le secteur de l’éducation vivra dans les tout prochains jours au rythme des grèves. Le syndicat des corps communs, la coordination des syndicats de l’éducation et le Cnapest ont décidé de plusieurs jours de débrayage (respectivement les 8 et 9 février, 10 et 11 et enfin le 16 février) pour des revendications socioprofessionnelles.

Cet énième appel à la grève intervient après plusieurs rounds de négociations et de discussions avec le ministère de l’Education nationale, qui s’avère être dépassé par le dossier. La ministre de l’Education nationale, Nouria Benghebrit, a clairement signifié à ses partenaires sociaux que la concrétisation de leurs revendications, notamment celles liées à la révision du statut particulier du secteur et le régime indemnitaire, relève des prérogatives du Premier ministère.

Les mises au point de la ministre n’ont pas eu l’impact souhaité puisqu’une série d’actions de protestation se prépare. C’est avec une grande inquiétude que ces appels ont été reçus par les parents d’élèves. L’Association nationale des parents d’élèves s’interroge sur les motivations réelles des enseignants : «Depuis quelques années, la grève est devenue le seul mode d’expression des enseignants qui nous ont habitués à plusieurs mouvements de protestation par an.

Les enseignants, qui sont parfaitement dans leur droit d’exiger une amélioration de leur situation socioprofessionnelle, devraient changer de moyen de le faire en évitant de pénaliser nos enfants», explique Khaled Ahmed, président de cette association. En essayant d’exercer une pression sur la ministre pour arracher des promesses de changement, les enseignants tentent de faire front commun. «Je suis étonné que les enseignants demandent à ce qu’ils soient écoutés par la ministre, alors que cette dernière vient de le faire avec chaque syndicat», fulmine M. Khaled qui a été reçu, lui aussi, au ministère dimanche dernier. «Je ne vois pas en quoi ces journées de grève vont changer le cours des choses, si ce n’est retarder nos enfants dans leur programme.»

Cette association dénonce le mutisme des hautes autorités du pays face à ce qu’elle qualifie «d’atteinte au droit des enfants à une bonne scolarité». Pourquoi les enseignants tiennent-ils à ce débrayage, sachant que leurs doléances ne seront pas de sitôt satisfaites ? Pour le professeur universitaire Mourad Ouchichi, les revendications plutôt salariales des travailleurs de l’éducation étaient «prévisibles et légitimes au vu du taux de l’inflation qui a rattrapé les dernières augmentations». Selon cet expert, l’injection dans le cadre des augmentations salariales de sommes importantes dans l’économie sans contrepartie productive a été, en toute logique, rattrapée par un taux d’inflation galopant rendant ces majorations salariales, obsolètes.

En faisant front commun, les syndicats du secteur de l’éducation cherchent sûrement à créer un rapport de force qui leur permettra de faire fléchir les pouvoirs publics décidés à être plus regardants dans les dépenses après la chute du prix du pétrole. N’ayant aucune stratégie pour affronter le front social, les pouvoirs publics pourraient céder pour ne pas compromettre une paix sociale déjà fragile.
Pour M. Ouchichi, tous les indicateurs concernant l’inflation et le pouvoir d’achat «sont au rouge». Le pays sera inévitablement confronté, prochainement, à d’autres mouvements de protestation similaires dans les autres secteurs de la Fonction publique.
Fatima Arab