Emeutes de janvier 2011: Les premières conclusions de la commission d’enquête

Emeutes de janvier 2011: Les premières conclusions de la commission d’enquête

par Yazid Alilat, Le Quotidien d’Oran, 19 septembre 2011

Les troubles qui ont embrasé plusieurs villes et villages d’Algérie au mois de janvier dernier, avec un bilan de plusieurs morts et des centaines de blessés parmi les manifestants et les forces de l’ordre, ont été provoqués par « la mauvaise organisation du marché » des produits de large consommation. Ce sont, du moins, les premières conclusions de l’enquête menée par une commission parlementaire installée en avril dernier pour faire toute la lumière sur ces événements.

Les troubles avaient touché les grandes villes du pays, notamment à Alger, Oran et Constantine, et des pertes en vies humaines ont été également déplorées, notamment à Bou-Ismail, dans la wilaya de Tipasa. A l’origine de cette éruption de colère des jeunes, qui ont saccagé et cassé tout ce qui passait sous leur main, la hausse soudaine des prix des produits de large consommation, l’huile et le sucre particulièrement. C’est en fait la principale raison invoquée officiellement pour expliquer cette explosion de l’ire des jeunes, au moment où en Tunisie le régime de Ben Ali vacillait et que débutait le Printemps arabe. Un Conseil ministériel réuni en urgence avait décidé de mesures exceptionnelles pour ramener les prix de ces denrées à leur juste « valeur » et calmer le jeu sur le plan politique. Selon les déclarations du président de cette commission d’enquête, M. Kamel Rezki, ‘la mauvaise organisation du marché était, pour l’essentiel, à l’origine de la pénurie de ces produits enregistrée en début d’année. » Pour lui, « la mauvaise organisation du marché national et la non maîtrise des mécanismes d’importation et de distribution» étaient les principales causes de la pénurie de produits de large consommation, notamment en janvier dernier. Il a précisé, lors d’une réunion tenue hier dimanche en marge de la reprise des travaux de la commission pour l’élaboration d’un bilan global de son activité et la rédaction de son rapport final, que les visites effectuées par les membres de la commission au niveau des unités de production des produits alimentaires ont révélé que parmi les dysfonctionnements figuraient «la carence de certains produits de large consommation importés ou produits au niveau national et le déséquilibre en matière de distribution». Sur les autres causes de ‘cette pénurie » et la perturbation du marché national, M. Rezki a affirmé que la commission «délibère dans le secret total conformément à la loi organique de l’APN à qui le dernier mot revient quant à la publication ou non des résultats de cette enquête». Il a par ailleurs précisé que les membres du gouvernement en charge des secteurs concernés par l’enquête, comme l’Agriculture, les

Finances, le Commerce et le Transport, ainsi que les responsables des organismes publics économiques et les opérateurs économiques «ont adhéré à la mission de la commission». La commission a été scindée en deux groupes qui vont procéder à la rédaction du rapport final qui englobera l’analyse des données à l’origine des pénuries qui ont provoqué les émeutes de janvier dernier. M. Rezki estime que la subvention des prix de certains produits de large consommation (huile, sucre, blé et lait), qui profite à tous (nationaux ou étrangers), constitue» une lourde charge pour le Trésor public», proposant que cette aide profite directement aux catégories sociales à faible revenu et «nécessiteuses».

Le bureau de cette commission d’enquête parlementaire est composé du président (député FLN), du vice-président (député MSP) et du rapporteur (député RND). Lors de son installation, le président de l’Assemblée populaire nationale (APN) M. A. Ziari, a expliqué que c’est « une commission d’enquête dont la création a été adoptée par l’APN et vise à identifier les causes et les circonstances de la flambée des prix des produits alimentaires en menant des investigations avec toutes les parties concernées». Pour autant, le rapport final sur les causes réelles ou supposées des troubles de janvier devrait englober tous les aspects de ces incidents qui ont ébranlé le pays, un peu plus de 20 ans après le 5 octobre 1988. Et, surtout, étaient intervenus dans des circonstances politiques et économiques étranges, et concomitamment avec ce qui se passait en Tunisie et ce qui se préparait en Egypte.