FLN: Entre vrais et faux congressistes

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Entre vrais et faux congressistes

Le Quotidien d’Oran, 1 février 2005

Le FLN innove et surprend. Les séances de travail du congrès ne commencent que l’après-midi alors qu’il crée un poste de président spécialement pour le président Bouteflika. Et personne d’autre.

La seconde journée du congrès a été trop longue. Au lieu du «maoutini» du premier jour distillé à plein tube pour faire patienter les présents, on a eu droit à des interventions aussi longues et terriblement ornées d’une rhétorique usagée sans grande portée politique. L’assistance occupée dans les discussions en petits groupes n’a pas beaucoup prêté attention à Boualem Benhamouda qui ouvrit le bal à un peu moins de midi. Valeurs, constantes, compétences, idées, patrie et drapeau et sans oublier le parti de toute l’Algérie et du peuple étaient dans tous les discours dans lesquels les propositions étaient «une denrée rare».

Alioui, de l’Union des paysans, et Tahar Zbiri ont usé du même dictionnaire. Sauf que ce dernier a été bref. Des travaux pleins d’enseignements se tenaient aussi à l’extérieur de la coupole du 5 Juillet. Des mécontents, des déçus et des éjectés ne cachent pas leur sentiment devant les gens de la presse. Retour dans la salle ovale où le spectacle se poursuit sans apporter de nouveauté. Mais il fallait occuper ces heures, ce temps d’attente et donner l’air de réellement travailler, de réellement «congresser». En fait, on attendait le rapport de la commission de validation des candidatures au congrès. Arrive enfin, vers 13 heures, Saïd Barkat, le président de la commission de tri des délégués, avec sous le bras la chemise du rapport tant attendu.

Sur les 3.310 congressistes, 348 ne répondent pas aux critères. Si l’on a des précisions sur 76 cas qui sont militants du parti, mais n’ont pas la qualité d’éligibilité au congrès, l’on ne saura pas plus sur le reste. Il y a des militants d’autres partis et des élus sur des listes parallèles. Ils sont tous débusqués, et Belkhadem a demandé à ce que leur soient retirés les badges. Il reste donc 2.962 délégués qui poursuivent les travaux. Mais pour certains, notamment ceux qui étaient dans le camp Benflis, il y aurait plus «d’indus» congressistes. Mais on fait avec pour réussir le congrès dont le clou sera l’élection du secrétaire général. Il y a un seul prétendant: Abdelaziz Belkhadem. L’autre bataille est engagée par les parlementaires dont la rumeur sur leur quota dans le conseil national a vite fait monter le ton. Les élus des deux chambres n’auront droit qu’à 15 sièges. C’est ce que nombre d’entre eux nous ont confié. Et pour imposer un quota respectable, pro Benflis et redresseurs se sont spontanément unis. Les travaux, après une pause méritée, ont repris vers 16 heures. Toutefois, le génie du FLN étant ce qu’il est, les journalistes sont invités à un point de presse animé par le porte-parole du congrès, Boualem Bessaïh. Trop tard pour rebrousser chemin et assister à la bataille du retrait des badges des délégués «illégaux». Idem pour l’installation des cinq commissions. Elles sont, bien entendu, présidées par les membres du bureau du congrès. La soirée s’annonce longue. Très longue pour certains. L’obscurité devrait remplacer les coulisses, leur utilité étant la même dans ce genre de conclave. Les travaux devraient traîner encore demain. Pourquoi ?

Alignés désormais derrière Belkhadem, les délégués attendent désespérément la venue de celui qui devrait présider aux destinées du parti. Bouteflika est annoncé, tout comme sa candidature à la tête du parti qui n’a fait l’objet d’aucune demande officielle. Il sera là pour la clôture, martèlent des cadres et militants. C’est donc sa venue ou non qui détermine l’issue du 8e congrès qui n’a affecté finalement que les structures du parti.

Djilali B.

«Bouteflika, sinon rien»

Si le président de la République refuse la demande qui lui est faite d’être le président du FLN, le poste créé par les nouveaux statuts restera vacant. Dans l’hypothèse bien sûr de son adoption par le congrès sans avoir à connaître la position du chef de l’Etat. C’est le porte-parole du congrès, M. Boualem Bessaieh, par ailleurs ambassadeur de l’Algérie au Maroc, qui s’est exprimé ainsi lors d’une conférence de presse animée au centre de presse du stade du 5 Juillet. Il aura confirmé de la sorte que le poste est spécialement conçu pour le président Bouteflika auquel il est demandé «avec insistance par les militants et le congrès d’accepter l’offre». Il n’y a pas d’anomalie, à ses yeux, à ce qu’il cumule le mandat de président de la République de tous les Algériens et celui de président du parti. Il ajoutera que tous les projets de texte soumis au congrès cautionnent le programme et la démarche du chef de l’Etat. «Il devient donc fatal qu’il devienne le président du FLN, aux yeux des militants». Et la double casquette ne sera pas une exception algérienne. Bessaieh citera l’exemple de Jacques Chirac et de George Bush.

L’ennui est que les responsables du FLN ne savent pas si cette offre recevra une suite favorable. «Peut-être que l’invitation ne lui a pas encore été transmise même», a avoué le conférencier dans un accès de franchise. En revanche, il se montrera plus sûr à l’évocation du futur secrétaire général, en désignant Abdelaziz Belkhadem comme l’unique potentiel candidat, confirmant ainsi une quasi-certitude que ce dernier sera le futur SG pour avoir été présenté par tous comme la personnalité consensuelle, en cette phase de réunification interne. Beaucoup lui attribuent déjà le mérite d’avoir réussi la mission de ressouder les rangs éclatés du FLN.

Belkhadem pourra ajouter, à l’issue du congrès, à son palmarès, le fait d’avoir mené de main de maître les travaux du conclave dont il a été le président. Il s’est retrouvé aussi dans la sensible commission des candidatures qui promet des joutes chaudes en son sein puisqu’il s’agira de distribuer des quotas de représentation, dans l’instance du conseil national de près de 500 membres, instance névralgique de laquelle seront issus tous les autres nouveaux organes de direction. Le problème des faux délégués a occupé, d’autre part, une bonne partie de la conférence de presse. La commission de validation des mandats qui a eu à plancher sur 348 recours acceptés a présenté son rapport en plénière. Après apurement, le chiffre initial de 3.310 congressistes est tombé à 2.962 dont 413 femmes. 348, c’est le nombre d’indus délégués qui se répartissent entre ceux qui ne remplissent pas les critères de l’ancienneté de militantisme et ceux qui appartiennent à d’autres partis politiques ou encore ceux dont le casier judiciaire est estampillé d’antécédents judiciaires.

Selon le porte-parole du congrès, le problème est survenu dans la foulée de la réconciliation interne et de la réunification qui a fait naître chez les militants un intérêt aigu pour les assises, se traduisant par «un engouement» pour la participation. S’exprimant sur la tranche d’âge des congressistes, il révélera que 83% d’entre eux ont entre 20 et 30 ans et que 65% de la composante jouissent d’un niveau d’instruction universitaire. Ce qui lui fera dire que la jonction entre les générations est assurée puisque les 30-50 ans sont représentés dans une proportion de 42% et les plus de 50 ans sont à 20%. Une façon de marquer la différence avec le congrès invalidé par la justice où il est retenu contre Benflis le grief d’avoir écarté la vieille garde.

Omar S.