Immigration : Mort d’un migrant algérien «sans papiers» dans une prison à Malaga

Immigration : Mort d’un migrant algérien «sans papiers» dans une prison à Malaga

Les agents chargés de la sécurité ont découvert, vendredi dernier, dans le centre d’internement temporaire des étrangers (CIE´s) d’Archidona à Malaga, en Andalousie, dans le sud du pays, le corps sans vie d´un homme de nationalité algérienne, âgé de 37 ans .

Espagne, De notre correspondant, El Watan, 2 janvier 2018

Le corps de Mohamed Bouderbala a été retrouvé par des fonctionnaires en charge de sa garde dans sa chambre individuelle. Les tentatives de réanimation des agents, qui ont également alerté les services de santé, se sont avérées vaines. Il s´agit d´un suicide, a déclaré la police nationale dans un communiqué.

La police nationale espagnole a ouvert une enquête pour clarifier les circonstances de la mort du détenu algérien dans une prison où des centaines de migrants «sans papiers», arrivés par la mer, avaient été provisoirement placés fin novembre, contre l´avis des organisations locales de défense des droits des immigrés, et attend les résultats de l’expertise médico-légale.

En outre, l’autorité judiciaire a été informée.
Les autorités espagnoles ont fait savoir que les centres de rétention pour étrangers étaient complètement saturés et que cette prison est au moins équipée de «douches, chauffage, lits et salles de sport».

Le défunt était arrivé dans la prison d’Archidona à Malaga, provisoirement improvisé comme centre de rétention administrative, ou près de 500 migrants, majoritairement algériens arrivés par la mer, avaient été placés après qu’un tribunal de Lorca (Murcie) ait émis une décision, datée du 20 novembre, autorisant son internement jusqu’au 18 janvier.

Réactions

Cet événement tragique a provoqué un véritable séisme au niveau de la communauté immigrante en Espagne. La prison d’Archidona, toujours non habilitée en tant que telle, accueille les immigrants arrivés sur les côtes espagnoles depuis la fin du mois de novembre.
La présidente de Malaga Acoge, Arantxa Triguero, a déclaré qu’ils s’opposaient radicalement à ce que ces personnes soient transférées dans une prison, considérant également que «cela viole leurs droits fondamentaux». De nombreuses ONG ont dénoncé des conditions «lamentables» de la prison d´Archidona. Malaga Acoge a insisté sur le gèle des renvois immédiats des détenus pour éviter le départ de «témoins possibles», nécessaires pour mener une enquête approfondie.

La sénatrice de Podemos Andalucía, Maribel Mora, a déclaré : «Ce qui s´est passé est un grand malheur pour l´Espagne, car ces immigrés ont été traités d’une manière absolument inhumaine.» Et d´ajouter : «Ces immigrés se plaignent du manque de nourriture et de vêtements. Ils n´ont reçu aucune assistance psychiatrique ou psychologique.» «La situation est difficile et dramatique.

Ce genre de situations devrait nous faire réfléchir sur les politiques d’immigration pratiquées par l’Etat espagnol. Ce sont des politiques inhumaines», conclut- elle.
Alberto Garzón, coordinateur général de Izquierda Unida (UI), a déclaré que la mort d’un immigrant en prison à Archidona (Malaga) devrait tomber sur la conscience de ceux qui dirigent cette politique de violation des droits de l’homme.

Pour sa part, David Serrada, porte-parole du département de l’intérieur du groupe socialiste au Congrès, a demandé l’apparition immédiate du ministre de l´Intérieur, Juan Ignacio Zoido, pour donner des explications.

«Ce qui s´est passé est la goutte qui a fait déborder le vase. Cela devrait donner à réfléchir au ministre de l’Intérieur et reconnaître qu’il était dans l´erreur pour avoir autoriser de mettre des immigrés dans ce centre, chose qui aurait pu être évitée», a déclaré Serrada. Par ailleurs, le ministre de l’Intérieur, Zoido, a déclaré que l’internement de plus de 500 immigrés dans la prison d’Archidona (Malaga) est «une situation exceptionnelle et provisoire», et a affirmé que ce centre «a des conditions infiniment meilleures» que tout autre CIE´s d’Espagne. «Nous ne pouvons pas faire face a cette situation en raison du nombre élevé de personnes qui atteignent tous les jours les côtes espagnoles», a ajouté le ministre de l’Intérieur.

Une manifestation a été organisée devant le centre pénitencier d’Archidona à Malaga par plusieurs ONG et associations locales pour demander la fermeture définitive des CIE´s et une enquête sérieuse sur les circonstances de la mort de Mohamed Bouderbala.

Précédents

Ce n’est pas la première fois que le mot «suicide» est lié aux centres de détentions des immigrés. En 2008, dans un autre centre à Malaga, Capuchinos, actuellement fermé, un Détenu, qui a tenté de se suicider, a été expulsé. Quelques semaines plus tard, il a été retrouvé mort.
Dans le centre d’Aluche à Madrid, cette année, le SOS racisme a dénoncé le mauvais traitement réservé aux détenus après plusieurs tentatives de suicide. Et dans le CIE’s de Valence, deux plaintes ont été présentées pour tentative de suicide, ces deux derniers mois. Dans tous les cas, autour de ces événements, des allégations de mauvais traitements ou de mauvaises conditions sont souvent signalés dans les centres de détention des étrangers en Espagne.

Témoignages

Dans une vidéo filmée de l´intérieur de la prison, on découvre des témoignages émouvants sur la mort de Mohamed Bouderbala. Les détenus algériens témoignent tout d´abord des mauvaises conditions qu´ils vivent dans cet établissement pénitentiaire d’Archidona, à Malaga, et se disent victimes de différentes formes de «mauvais traitement et de privation de droits». «Nous sommes environ 350 Algériens et nous sommes dans une prison pas dans un centre», affirme un des détenus. «Le défunt qui habitait la cellule n°41 a été victime d´agression de la part des agents, nous avons tout entendu.

Et en plus, Mohamed n´est pas du genre à se suicider. Il est probablement mort d´une hémorragie interne», témoigne son voisin de la cellule n°40. «Il est impossible de se suicider dans une cellule aussi petite comme celle-là», ajoute un autre détenu. Enfin, tous les témoins de la vidéo écartent définitivement la thèse d´un suicide et demandent aux autorités algériennes d´intervenir afin de mettre fin à leurs cauchemars.