Les partisans de Bouteflika tonnent, l’opposition murée dans le silence

Les partisans de Bouteflika tonnent, l’opposition murée dans le silence

par Kharroubi Habib, Le Quotidien d’Oran, 10 novembre 2015

Tandis que les chefs de partis de la mouvance présidentielle se sont déchaînés contre le groupe des 19 personnalités ayant adressé une demande d’audience au président Bouteflika au motif implicite de vérifier qu’il possède encore les capacités et la lucidité de gérer le pays, l’opposition se cantonne dans un étrange mutisme. Pourtant que des personnalités n’affichant aucun lien avec elle soient initiatrices d’une démarche dont les motivations rejoignent la perception qui est la sienne de la situation au sommet de l’Etat aurait pu inciter l’opposition à leur exprimer son approbation. Ce qu’elle n’a pas fait et ne fera probablement pas. Car il existe une différence de taille entre la démarche de ces personnalités et la position de l’opposition sur la situation au sommet de l’Etat.

Le groupe des 19 a en effet entrepris sa démarche sans esprit de dénier au chef de l’Etat la légitimité qu’il a à rester à son poste s’il est en capacité physique et intellectuelle de s’y maintenir, légitimité que l’opposition lui dénie absolument et quelle que soit la vérité de son état de santé. Son refus découle de sa conviction que sa réélection pour un quatrième mandat Bouteflika ne l’a obtenue que par une fraude électorale qui a confisqué la volonté populaire souveraine. Aussi, si elle doit probablement se réjouir que des personnalités qui ne font pas ce grief à Bouteflika se sont avisées qu’il pourrait n’être maintenu dans ses fonctions que pour servir de paravent aux agissements d’un groupe anticonstitutionnel, elle doit certainement n’avoir pas apprécié leur démarche qui n’est pas conforme à son attitude de refus de tout acte de ce genre qui évacuerait inévitablement le « fait accompli frauduleux » de l’élection présidentielle. Pour elle, donc, il ne peut être d’autre démarche que celle d’acculer le pouvoir à entendre enfin que la situation au sommet de l’Etat exige comme elle le revendique une transition démocratique sans Bouteflika sain ou physiquement handicapé.

Des composantes de l’opposition sont d’autant méfiantes à l’endroit de l’initiative des 19 qu’elles soupçonnent certaines des personnalités qui s’y sont associées d’être sur le registre de la manipulation politicienne dont les véritables concepteurs n’ont aucun intérêt à ce qu’il soit mis fin à la « vacance du pouvoir » que l’opposition dénonce. Il n’en demeure pas moins que les motivations avancées par le groupe des 19 pour expliquer et justifier sa démarche a ramené de l’eau au moulin de l’opposition.

En faisant de la vacance de pouvoir réelle ou supposée son argument de bataille, l’opposition avait fini par déranger un large pan de l’opinion publique à qui elle n’a pu fournir la preuve que telle est la situation au sommet de l’Etat. Enfourchant ce même argument, les personnalités du groupe des 19 ont incontestablement relancé le débat sur cette cruciale et sensible question avec l’avantage qu’elles sont considérées ne cultivant pas une hostilité tranchée et irrévocable à l’encontre de Bouteflika.