Des centaines de personnes ont marché hier à Bamako

Des centaines de personnes ont marché hier à Bamako

Les opposants à l’intervention militaire se font entendre

El Watan, 29 septembre 2012

Les manifestants estiment que l’armée malienne est tout à fait capable de guerroyer contre les islamistes.

En plus des résistances externes, notamment celle des pays du champ comme l’Algérie qui redoute que cela n’allume la mèche de l’instabilité dans toute la région, les Maliens eux-mêmes ne sont pas sur la même longueur d’onde. Signe de cette résistance à une intervention armée tant désirée par la France et la Cédéao, plusieurs centaines de personnes ont manifesté hier, à Bamako, à l’appel de la Coordination des organisations patriotiques du Mali (Copam).

Leur mot d’ordre ? S’opposer à une intervention militaire des forces étrangères au Mali pour reconquérir le nord du pays. Les animateurs de ce front de refus, évalué à plusieurs centaines de personnes, ont marché de la place de la Liberté jusqu’aux abord du ministère de la Défense «pour soutenir l’armée malienne» souveraine, a déclaré le président de la Copam, Younouss Hameye Dicko. Les manifestants partagent le souci de faire déloger les radicaux islamistes du Nord, ils n’entendrent pas pour autant confier la mission à une «légion» étrangère.Brandissant trois grandes banderoles sur lesquelles on pouvait lire : «Le Mali, rien que le Mali», «La Copam soutient l’armée pour la libération du Nord» ou encore «L’arrivée de la Cédéao déclenchera la guerre civile au Mali», les manifestants se mettent ainsi au travers du désir du président Traoré et ses «conseillers» locaux et étrangers.

La Copam, réputée proche de l’ex-junte qui a mené le coup d’Etat militaire du 22 mars, rejette ainsi l’accord entre la Communauté des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao) et le Mali, annoncé le 23 septembre. Cet accord prévoit le déploiement au Mali de troupes ouest-africaines, pour «appuyer» l’armée malienne dans la reconquête du Nord occupé depuis six mois par des groupes islamistes armés liés à Al Qaîda au Maghreb islamique.

La Cédéao dans le box des accusés

Derrière un grand drapeau malien, les marcheurs scandaient : «A bas la Cédéao, à bas Blaise Compaoré (président burkinabé et médiateur dans la crise malienne), à bas Yayi Boni (président du Bénin et de l’Union africaine), à bas Alassane Ouattara (président de la Côte d’Ivoire et de la Cédéao)». Ils accusaient le président malien de la transition, Dioncounda Traoré, d’avoir «bradé la dignité malienne» en ayant demandé à l’ONU son feu vert pour le déploiement au Mali d’une «force militaire internationale». «Amener des forces étrangères au Mali, nous sommes contre !

Nous ne nous opposons pas à un soutien international si cela répond aux besoins de l’armée malienne clairement exprimés – logistique, renseignement, formation, appui aérien – mais il faut s’en tenir à ça», a déclaré à l’AFP Nouhoum Keita, du parti Solidarité africaine pour la démocratie et l’indépendance (SADI) dont le président Oumar Mariko était présent.
Les manifestants exigeaient également que la Cédéao «libère les armes» de l’armée malienne bloquées dans différents ports ouest-africains depuis le coup d’Etat de mars qui avait renversé le régime du président Amadou Toumani Touré. Voilà qui a le don de remettre les compteurs à zéro dans l’équation malienne. Alors que la France a entamé son branle-bas de combat en envoyant ses forces spéciales et ces hélicoptères en pièces détachées, rien n’est pourtant sûr.

Les manifestants d’hier estiment que l’armée malienne est tout à fait capable de guerroyer contre les islamistes du Nord, pour peu que la Cédéao débloque les stocks d’armes commandées par l’ex-président ATT.
Le secrétaire général du ministère de la Défense, le colonel major Mamadou Idrissa Coulibaly, a confirmé hier : «Des négociations au plus haut niveau sont entreprises pour libérer nos armes bloquées dans les ports de Conakry et de Dakar.» C’est dire que les opposants à l’intervention militaire étrangère disposent d’un argument de destruction massive pour mettre en échec l’expédition en préparation préparé ailleurs et mise en scène par le président Dionconda Traoré.
Hassan Moali