Charte et Référendum: Overdose

Conjoncture

Overdose

El Watan, 14 septembre

Si le peuple algérien est, dans son écrasante majorité, pour la charte pour la paix et la réconciliation nationale, comme ne cessent de le marteler les personnalités représentants de partis politiques et des organisations sociales qui font campagne pour le projet sur un ton de certitudes qui nous fait penser presque à un texte révélé, qu’est-ce qui justifie alors cette débauche d’énergie qui relève quasiment du matraquage des esprits et des consciences ?

Depuis le lancement officiel de la campagne à Sétif par le président de la République, début août, la vie publique s’est arrêtée pour céder la place à l’unique préoccupation du Pouvoir : susciter l’adhésion populaire au projet de charte nationale. L’attitude des pouvoirs publics et de tous les relais politiques et sociaux qui se sont investis jusqu’à la démesure, avec les moyens de l’Etat, dans la campagne électorale pour le « oui » à la charte pour la réconciliation nationale est-elle le signe d’une assurance et d’une confiance retrouvées du Pouvoir dans ses rapports avec le peuple ou bien alors exprime-t-elle un sentiment de doute quant au résultat du référendum, laissant croire que toutes les options restent ouvertes ? Les méthodes antidémocratiques utilisées par les appareils de l’Etat et ses relais pour orienter le vote des électeurs dans le sens d’un « oui massif » en usant du chantage et de la surenchère contre toutes les voix dissonantes laissent penser que le prochain référendum est loin d’être une simple formalité pour une cause supposée entendue et largement soutenue par le peuple algérien, comme cela ressort du discours officiel répercuté lors des meetings dits de sensibilisation autour du projet de charte nationale. Lorsque l’on est sûr de son fait on ne reproduit pas les mêmes réflexes éculés du parti unique pour imposer un choix politique en jouant sur les transferts des populations pour faire exploser l’applaudimètre lors des meetings. Autrement dit, si le Pouvoir avait affaire à un peuple pleinement convaincu que la voie choisie pour rétablir la paix dans le pays à travers le projet de charte nationale était celle de la sagesse et de l’équité est-il besoin alors de prêcher à travers une campagne électorale interminable, à sens unique pour un peuple prétendument totalement acquis au contenu de la charte ? A moins que l’on prenne le peuple algérien pour une entité immature et dépourvue de toute intelligence, incapable de discernement pour lui administrer comme on gaverait des oies une overdose de discours faisant appel au patriotisme, à la solidarité, à la cohésion nationale retrouvée, aux vertus islamiques du pardon.

Bensalem Sofiane