Chirac confère la Croix de la légion d’honneur à la ville d’Alger

Chirac confère la Croix de la légion d’honneur à la ville d’Alger

par Mohamed Tayeb , Le Jeune Indépendant, 16 août 2004

Le hasard de l’histoire a voulu que, 60 ans après, les retrouvailles franco-algériennes connaissent un jalon supplémentaire dans leur processus sur un bâtiment de guerre au nom évocateur. C’est en effet sur le Charles-de-Gaulle, ancré en rade à Toulon, que le président français Jacques Chirac a annoncé sa décision de conférer à titre unique et exceptionnel la Croix de la légion d’honneur à la ville d’Alger en qualité de capitale de la France combattante.

Si le geste est fort, il n’en est pas moins symbolique en ces temps de progressif scellement de la réconciliation entre les deux pays, engagés par ailleurs dans un douloureux travail et effort de mémoire. Que Chirac ait annoncé cette décision en présence du président Bouteflika à bord du porte-avions de la marine française ajoute immanquablement de l’épaisseur au geste ! Dans le même temps, Chirac n’a pas manqué, alors qu’il rendait un vibrant et chaleureux hommage aux fils du Maghreb engagés dans la libération de la France, de rappeler à l’adresse du roi Mohamed VI que le grand-père de ce dernier, Mohamed Benyoucef, qui sera connu plus tard comme Mohamed V, avait reçu des mains du général De Gaulle la Croix de compagnon de la libération.

Ce faisant, le président français en décernant une distinction à Alger et en évoquant le passé historique du souverain marocain a semblé faire un clin d’œil direct aux chefs d’Etat des deux pays alignés face à lui mais pas côte à côte pour qu’ils s’inspirent de l’histoire commune de leurs peuples afin de construire ensemble l’avenir de la région.

Arrivés séparément à bord du Charles-De-Gaulle, Bouteflika et Mohamed VI ont donné l’impression de s’éviter et de s’ignorer superbement en dépit de la rigueur du protocole.Bouteflika s’était joint dès samedi à Paris aux autres chefs d’Etat invités aux cérémonies commémoratives du débarquement en Provence et participé au déjeuner offert en leur honneur par Rafarin avant de se rendre ensemble à Toulon, puis en hélicoptère à bord du Charles-de-Gaulle, alors que Mohamed VI a soigneusement évité de se mêler au groupe, se rendant d’abord directement à Nice, puis, de là, à Toulon, comme pour éviter de se retrouver dans le même groupe que Bouteflika.

C’est du moins l’impression qui s’est dégagée d’une telle attitude. M. T.