Lancement du deuxième satellite sur le développement de l’Algérie

Azzedine Oussedik. Directeur général de l’Agence spatiale algérienne (ASAL) :

« L’activité de l’Algérie est dans un cadre pacifique »

El Watan, 17 juillet 2010

– Quelles répercussions aura le lancement du deuxième satellite sur le développement de l’Algérie ?

Il faut souligner la complémentarité opérationnelle d’Alsat 2 par rapport à Alsat 1 en offrant une meilleure résolution spatiale des images satellitaires et donc un accroissement du champ d’application. En effet, dans le cadre de la mise en œuvre des projets d’application spatiale inscrits dans le Programme spatial national, horizon 2020 (86 projets) avec la collaboration de l’ensemble des secteurs utilisateurs nationaux, le recours à un système spatial national à haute résolution revêt un intérêt économique et technologique appréciable, notamment en diminuant l’utilisation des images des systèmes spatiaux internationaux, donc en réduisant les coûts d’acquisition. L’autre intérêt réside dans le renforcement de notre autonomie en matière de disponibilité et de couverture en données satellitaires. Alsat 2 nous permet également d’améliorer et d’actualiser la cartographie de base et thématique sur l’ensemble du territoire national.

– Pourquoi avoir choisi l’Inde précisément ?

La sélection de l’agence de lancement a été effectuée conformément à la réglementation en vigueur en Algérie. Dans ce cadre, les critères de sélection qui avaient été arrêtés s’appuyaient entre autres sur les paramètres suivants : la compatibilité du lanceur avec le satellite Alsat 2A, le nombre de lancements antérieurs et le taux de succès, le coût et la date de lancement la plus proche. L’agence spatiale indienne ISRO a été retenue pour avoir rempli l’ensemble des critères évoqués, avec le coût de lancement le plus avantageux et une succession de 15 lancements réussis avant celui d’Alsat 2A.

– L’Algérie a-t-elle les capacités lui permettant de maîtriser les technologies spatiales ?

L’émergence et la mobilisation d’une ressource humaine de haut niveau dans les domaines liés aux technologies spatiales constituent l’élément-clé pour le succès du Programme spatial national (PSN), à l’horizon 2020. Un Programme national de recherche (PNR), consacré aux technologies spatiales et applications, prévoit le développement de projets par les universitaires et les chercheurs nationaux, en relation avec l’Asal. La formation et la recherche constituent les préoccupations prioritaires du PSN car elles permettent la mise en place d’une compétence humaine capable de porter ce programme dans toute sa consistance et sa complexité.

– Où cela a-t-il lieu ?

Cinq grandes universités nationales (Alger, Constantine, Oran, Sétif et Tlemcen) participent activement à la formation doctorale de près de 50 candidats par promotion depuis 2007. Les spécialités couvertes par cette école doctorale, à laquelle participe le Centre des techniques spatiales d’Arzew, concernent le traitement d’images et les systèmes d’information géographique, les télécommunications spatiales, l’instrumentation spatiale, l’informatique embarquée et l’optique spatiale. Depuis 2006, nous enregistrons la formation de 20 docteurs, 160 masters, 200 ingénieurs et 220 licences dans les domaines liés aux technologies spatiales et leurs applications. La formation des compétences se multipliera dans les années à venir à travers une coopération plus dense avec l’ensemble des universités nationales, une mobilisation plus grande des compétences algériennes établies à l’étranger et une coopération internationale bien ciblée.

– Quelle est justement la place de l’Algérie dans le domaine du spatial ?

La mise en orbite de ce deuxième satellite d’observation de la Terre traduit la volonté de l’Algérie de poursuivre son programme au bénéfice du développement durable et du bien-être des populations, et d’inscrire l’activité spatiale nationale dans le cadre de l’utilisation pacifique de l’espace extra-atmosphérique. En effet depuis 2002, date du lancement d’Alsat 1, l’Algérie participe activement à la Charte internationale espace et risques majeurs mise en place par l’ONU, en mettant à sa disposition les images satellitaires des zones touchées par des catastrophes. A titre d’exemple, nous citerons les images de Alsat 1 prises sur l’Indonésie après le tsunami, sur les Philippines après des inondations, sur la Grèce et le Portugal après des incendies de forêt, sur les pays du Sahel lors des invasions acridiennes.

– Quel apport pour l’Afrique, par exemple ?

Au niveau africain, l’Algérie fait partie des pays leaders dans ce domaine, avec l’Afrique du Sud et le Nigeria. Elle joue un rôle moteur dans la mise œuvre du projet de constellation satellitaire African Ressource Management (ARM) destiné à la connaissance, à la gestion et au suivi des ressources naturelles africaines. D’ailleurs, la troisième Conférence africaine sur les technologies spatiales pour le développement, organisée récemment à Alger, a donné lieu à des recommandations fortes visant la généralisation de l’outil spatial à l’ensemble des pays africains pour le développement durable et la lutte contre la pauvreté dans ce continent. L’Algérie préside cette conférence jusqu’en 2011. En marge de cette manifestation, a été signé un accord entre l’ASAL et le Bureau des affaires spatiales des Nations unies pour la mise en place, à Alger, d’un bureau d’appui régional pour la prévention et la gestion des catastrophes naturelles par utilisation de l’outil spatial, et ce, dans la région de l’Afrique du Nord et du Sahel. Le choix porté par les Nations unies sur l’Algérie a été guidé par le niveau atteint par notre pays dans ce domaine et par la volonté politique du gouvernement algérien de mettre en œuvre un programme spatial ambitieux.

Par Hacen Ouali