Mohammed Samraoui répond à Hichem Aboud

Mise au point de Mohamed Samraoui :
réponse aux mises en cause de M. Hichem Aboud

Ainsi, au prétexte de dénoncer une manipulation de Canal +, Monsieur Aboud Hichem, l´auteur de la Mafia des Généraux, m’agresse de façon sournoise et insidieuse dans un long texte publié sur son site ( » Magazine 90 minutes de Canal+/Une grossière manipulation « , 30 octobre 2002).

Par principe je me suis toujours abstenu de répondre aux attaques de mes détracteurs, en particulier quand celles-ci relèvent de la pure sottise ou du simple délire. Pour une fois je dérogerais à cette règle, car, d´une part, les limites en la matière ont été franchies et d´autre part, parce que je crois qu’un silence méprisant pourrait être interprété fallacieusement par les larbins du pouvoir qui font fonction d’opposants de pacotille, catégorie bien connue que l’on appelle ironiquement chez nous, l’opposition  » taiwan « .

Ainsi, au prétexte de dénoncer une manipulation de Canal+, Monsieur Aboud Hichem , l´auteur de la Mafia des Généraux, m´agresse de façon sournoise et insidieuse dans un long texte publié sur son site.

Si, à l’évidence, Monsieur Aboud est libre d´avoir une opinion différente de la mienne, il n’a, en revanche, nullement le droit de m´imposer son point de vue. S´il estime que son témoignage a été manipulé c´est son droit absolu de réagir, de dénoncer ou d´ester en justice les auteurs du documentaire concerné. Il ne peut en aucun cas s´arroger le droit d´insulter les autres témoins, ni de porter atteinte à leur intégrité morale de manière pernicieuse. Je citerais à cet égard le passage suivant :  » des propos graves tenus par des personnes qui ont pour seul souci de libérer leur conscience des crimes commis contre le peuple algérien et dans lesquels ils ont une part de responsabilité importante. Et ce, en s´attaquant sans vergogne aucune à l´armée qu´ils ont déserté une fois leurs privilèges remis en cause « .

L’intention est claire : il s’agit d’installer un débat crapoteux. Je ne tiens pas à y entrer. Mais pour les observateurs attentifs de notre tragédie et afin de lever toutes les équivoques, je tiens à récuser de tels propos qui ne visent qu´à semer la confusion dans les esprits. Loin de tout faux fuyants ou de plaidoyer pro-domo.

Ainsi pour ces lecteurs, pour être parfaitement clair, au risque de la répétition, il n´a jamais été dans mes intentions d´attribuer les seuls massacres à l´ANP comme certains relais médiatiques se complaisent à le répandre. Les islamistes sont responsables de crimes et massacres, les militaires et notamment les services de sécurité ont en également commis. Ce que d´ailleurs tout le monde reconnaît, y compris les généraux Khaled Nezzar et Liamine Zeroual , qui en tant que chef de l´Etat , a reconnu l´existence d´  » escadrons de la mort  » .
Je ne vois pas où et quand j’aurais mis en cause l´armée en tant qu’institution, à moins que les accusations que je porte contre les généraux véreux et responsables de la tragédie qui dure depuis douze ans, ne soient assimilées à  » des attaques contre l´ANP « . En effet, tant que les généraux criminels se dissimulent derrière le paravent de l´institution militaire, il leur est loisible d´entretenir l´amalgame. Ceci même si dans le fond l´armée n’est qu’un instrument entre leurs mains et qu´ils ont fini par souiller.

Maintenant si pour Monsieur Aboud dénoncer les exactions de l´Armée est considéré comme un crime contre le peuple algérien, ceci est tout simplement grotesque. Prétendre que ceux qui ont déserté l´armée, l´ont fait parce qu´il a été mis fin à leurs privilèges c´est faire preuve de malhonnêteté intellectuelle et de mauvaise foi flagrante.
C´est tout à l´honneur de l´Armée Nationale Populaire que des officiers qui ont sacrifié leur carrière apportent leur témoignage , ils représentent à mon humble avis la conscience de l´institution militaire et sont les gardiens des valeurs sacrées de Novembre 1954. Les générations futures ne leur seraient que reconnaissantes .

Plus loin dans ce texte déjà cité, Monsieur Aboud ajoute  » je me refuse d´apporter ma caution à des déclarations faites par des éléments qui ont été témoins de la création du GIA par les services algériens sans broncher « . Je suis à l’évidence la cible du propos. Afin que nul n’ignore, je tiens à confirmer devant Dieu et devant les hommes que le GIA a bel et bien été crée par les services spéciaux algériens et j´en suis témoin. Libre à Monsieur Aboud de ne pas apporter sa  » caution  » à mes déclarations,  » caution  » que je n’ai au demeurant jamais sollicitée. Les victimes de l´entreprise criminelle des généraux Lamari, Toufik et consorts n´ont pour leur part nul besoin d´une caution – pour le moins – douteuse. De là à se faire le porte-voix des bourreaux du peuple algérien…C’est pourtant un pas que notre imprécateur franchit avec légèreté.

Pour votre gouverne et à l’adresse de ceux que vos déclarations auraient pu mystifier, apprenez Mr Aboud que j´ai  » bronché  » dés que j´ai eu la certitude que je servais les criminels au pouvoir et non le pays. Vous le savez bien, de décembre 1990 à février 1996 quatre demandes de radiation ont été formulées au DRS sans succès. Si ce discours mystificateur avait été tenu par quelqu´un d´autre j´aurais naturellement répondu qu’avant d´écrire n´importe quoi et de fourvoyer l´opinion, il importe d’abord de mener les indispensables investigations et demander aux intéressés de décrire leurs parcours. Venant de la part de quelqu´un qui prétendait être un ami, qui connaît mon profil et mes états de service, cela me surprend fortement et incite à formuler de multiples interrogations. A ce stade, je n’en exprimerais qu’une : pour qui roulez vous Monsieur l’opposant  » solitaire « ?

J’ai demandé par écrit à plusieurs reprises à Monsieur Aboud de ne plus me citer dans ses affaires personnelles en spécifiant que je ne tenais pas à être impliqué dans les conflits qui l´opposent à tel ou tel. Malheureusement je constate qu’il persiste dans sa démarche comme en témoignent ses écrits qui paraissent sur son site, je cite :  » pour préparer le procès que je leur intente , ils comptent sur Samraoui … « . Le paragraphe me concernant se conclut par « L´accusation ne pourrait que se retourner contre lui ; il lui suffit de lui demander qu´as tu fait depuis 1996 pour dénoncer les généraux ? « .

Sur ces points, voici mes réponses aux insinuations et allégations de Monsieur Aboud :

1/ Je suis totalement indifférent au procès que vous entendez faire à Canal+, ceci au nom de la liberté d’expression de chacun. Pour la simple raison que tout individu est libre de développer la thèse qu´il souhaite. Je suis convaincu de la nécessité du respect des opinions d’autrui même si ces opinions ne sont pas partagées. C´est la seule manière de faire avancer le débat et de parvenir à la vérité. Certainement pas par des mises en cause infondées et calomnieuses.

2/ Quelle est donc cette accusation que j´aurais porté contre vous ? Est ce parce que je n´ai pas accepté de retirer mon témoignage du documentaire de Canal+ comme vous me l´aviez suggéré que vous interprétez ma décision comme une accusation ? Ici encore, vous démontrez un certain talent en matière de désinformation, puisque bien avant la publication de votre texte sur votre site, je vous avais adressé un e-mail dans lequel je vous faisais part de mon intention de ne pas témoigner contre vous. Vous n’ignorez pas que je suis un homme d´honneur et de principe qui a toujours respecté ses engagements. Alors à quoi riment ces gesticulations et quel est l’objectif poursuivi ?

3/ Que vous soyez agent du DRS ou pas, cela ne m´intéresse pas non plus : c´est votre affaire pas la mienne. A partir du moment ou j´ai rompu définitivement avec le système en place il m´importe peu de savoir que vous préférez garder ou non vos contacts avec les éléments du DRS pour vous tenir informé ou pour toute autre raison. En tout état de cause, je ne souhaite pas vous servir d´alibi. Alors, soyez rassuré, je le réitère solennellement : je n´irai pas témoigner contre vous. Ce serait vous faire trop d´honneur, un honneur que vous ne méritez absolument pas.

4/ Quant à supputer les voies et moyens que j’aurais pu utiliser pour témoigner contre les généraux criminels, c´est – clairement – un autre débat. Mais à l’adresse de l’opinion sincère je crois utile de préciser que je ne crois pas à l’action individuelle. Je n´ai pas de problème d´ego et je connais mes limites, il n’a jamais été dans mes intentions de jouer les Don Quichotte et à guerroyer contre des moulins à vent. Nous ne sommes pas dans une représentation théâtrale ou dans de simples enjeux de personnes, notre pays vit une catastrophe humaine et politique ; ce qui se passe en Algérie est extrêmement grave. Mais si le régime perdure c´est aussi parce que les généraux mafieux profitent de la dispersion des opposants et de l´atomisation de ce qui pouvait représenter un contre pouvoir, tout comme ils profitent de la complicité parfois inconsciente d´une bonne partie des intellectuels ; sans quoi jamais le chiffre de 200.000 victimes en dix ans n’aurait été atteint.

Je n´ai pas tenu à répondre à toutes les insinuations de Monsieur Aboud notamment lorsqu´il m´accuse en aparté – dans des messages  » privés  » – d´avoir  » entretenu les maîtresses des généraux  » ou d´avoir été  » le majordome  » du général Khaled Nezzar…Il s’agit là tout bonnement de considérations de caniveau, de propos de bas étage. Je préfère sourire de ces élucubrations indignes plutôt que de commencer à considérer le rôle éventuel d´un élément en service commandé chargé de la provocation.

Je termine en précisant que cette mise au point est la seule et la dernière à Monsieur Aboud, il est hors de question d´engager une polémique stérile avec un non-interlocuteur : sa pratique en l’occurrence est suffisamment éloquente. Je comprends son dépit mais il comprendra aussi que je ne tiens absolument pas à ce que ma crédibilité et ma sincérité soient susceptibles d´être transformées en vecteur stratégique d´induction en erreur de l´opinion publique.

N´ayant mandaté personne pour parler en mon nom, nul n´est autorisé à le faire pour la simple et bonne raison que le soussigné Mohammed Samraoui n´a nul besoin de tuteur pour exprimer ses opinions .

Le 19.11.2002.
Mohammed Samraoui