Hichem Aboud: Bientôt devant la Chambre criminelle d’Alger ?

Hichem Aboud:

Bientôt devant la Chambre criminelle d’Alger ?

Farid Belgacem, Liberté, 28 mars 2002

Hichem Aboud, auteur du livre La mafia des généraux, sera traduit devant la chambre criminelle près le tribunal d’Alger, a révélé à Liberté un avocat proche des centres de décisions. La procédure a été enclenchée, il y a quelque temps, “au plus haut niveau de l’État, et les pouvoirs publics, dont les instances juridiques, ont été tous saisis du dossier pour “accélérer la démarche”. Notre source ajoute : “L‘auteur ne sera pas convoqué avant juin prochain, élections législatives obligent.”

Pourquoi donc la Chambre criminelle et non une autre instance juridique compétente, chargée des affaires délictuelles, notamment celles relatives aux écrits diffamatoires ? Vraisemblablement, la plainte qui aurait été formulée aurait qualifié l’affaire de “criminelle”, donc passible devant une instance compétente en la matière. Car, en fait, “quand il s’agit d’un écrit diffamatoire, I’affaire ne peut être traitée que par une section spécialisée, à savoir le tribunal délictuel.

Or, d’ores et déjà, on aurait intenté cette action sur la base de quelques arguments relatifs à la criminalité. Ce qui est inconcevable puisqu’il s’agit d’un livre. Dès lors, on se demande sur quelle base et sur quelle qualification, Hichem Aboud devrait passer devant le tribunal criminel ?!”, nous a déclaré une autre source au fait des affaires juridiques. “J’accuse!”, voilà le mot qui dérange le plus les auteurs de la plainte, notamment les hautes personnalités du système et du régime algériens, citées par Hichem Aboud. Ce mot veut tout dire: le journaliste-écrivain détiendrait les preuves formelles de l’implication—directe ou indirecte—de toute personnalité citée dans son ouvrage dans la situation politique et économique actuelle du pays. Du crime en général, des détournements de fortunes en particulier, en passant par des déclarations faites derrière les portillons des casernes et autres bureaux des services secrets algériens, Hichem Aboud “accuse”, “cible” et “cite” nommément “les architectes du chaos”, “le génie de la manipulation” et, plus loin, “les coups fourrés” des systèmes qui se sont succédé depuis l’indépendance à nos jours. Mais, a-t-il les preuves écrites, sonores ou visuelles de ce qu’il a rapporté dans chaque ligne de cet ouvrage inédit dans les annales de l’histoire de l’Algérie indépendante. Rédigé dans le style affirmatif, loin de toute forme conditionnelle, I’ouvrage de Hichem Aboud est lu, interprété et médiatisé dans tous les pays d’Europe et du Maghreb. L’auteur avait déjà déclaré qu’il n’avait pas peur d’aller en justice —avec un procès transparent et légal— pour confronter les personnes “accusées”, au pire, de faire face à ceux qui animent la vie politique du pays dans l’ombre. Mais, acceptera-t-il de répondre à la convocation de la chambre criminelle, quand on sait que le procès aura un caractère strictement politique ? Au niveau du sérail politique, cette démarche serait justifiée par le fait que ce livre est une forme d’atteinte à l’image du pays, de ses institutions, plus particulièrement l’armée algérienne puisque des officiers supérieurs sont cités. Autrement dit, le livre de Hichem Aboud n’est ni plus ni moins qu’”une campagne de déstabilisation qui ne dit pas son nom” et que “l’ouvrage en question est une pure arnaque car l’auteur est loin de détenir et d’avancer la moindre des preuves de ce qu’il a écrit”, indiquera, en outre, notre source.

Ainsi, les instances juridiques compétentes risquent de vivre un moment fort de leur histoire si le journaliste-écrivain venait à se présenter devant la barre de la chambre criminelle d’ Alger. Journaliste averti et ex-officier de l’Armée nationale populaire, Hichem Aboud “risquerait gros car le fait que les hautes instances du pays retiennent l’idée de le traduire devant une Chambre criminelle, il aura à répondre à chaque fait avancé, à chaque personnalité citée et doit, de ce fait, se préparer à se défendre dans un procès qui revêt un caractère spécifique”.