RCD: Le boycott et ses… arrière-pensées

LE BOYCOTT ET SES… ARRIÈRE-PENSÉES

Ce que cache Saïd Sadi

L’Expression, 17 août 2002

Le RCD, sans grande surprise, vient de se prononcer pour un boycott actif des élections locales du 10 octobre prochain, rejoignant ainsi les rangs des «faucons» du mouvement des ârchs.
Le parti de Sadi, qui a longtemps laissé mûrir cette décision, ne pouvait faire autrement, indique-t-on de sources proches du docteur, puisque tous les «sondages» effectués sur le terrain donnaient le RCD perdant sur toute la ligne, confirmant de manière officielle ce que tout le monde suppute déjà plus ou moins ouvertement.
Cette décision est intervenue quelques jours seulement après l’annonce, inattendue, celle-là, du FFS de prendre part à ce scrutin. Elle intervient, également, à un moment où le mouvement des ârchs, après près de deux années de protesta, amorce un tournant décisif de son histoire, voire de son existence. Nombre d’observateurs avertis ont qualifié la décision du parti de Sadi de «jusqu’au-boutisme» dangereux tant pour la région kabyle que pour le parti lui-même, cela même si ce rejet actif trouve ses justifications dans de nombreuses raisons que les dirigeants du parti se sont bien gardés d’énumérer dans leur conférence de presse d’hier.
Ce parti, est-il besoin de le souligner, a perdu pas mal de terrain sur le plan national à cause de ses anachronismes, ses nombreux retournements de veste et son manque de constance et d’objectivité.
Ainsi donc, si son aire d’influence s’est rétrécie comme une peau de chagrin, il lui reste quand même son bastion kabyle.
Un bastion qu’il sera bien obligé de disputer à ce puissant parti qu’est le FFS.
Un parti totalisant quarante longues années de militantisme, avec une figure de proue Aït-Ahmed et des sympathies officiellement exprimées au sein des plus grandes familles de cette région.
Impossible d’accuser, donc, le FFS d’une quelconque accointance avec le pouvoir puisque aussi bien son passé que ses positions plaident en sa faveur. Comme souligné plus haut, le RCD a acquis la ferme conviction qu’il n’aura aucune chance de s’imposer face au FFS, risquant même d’essuyer un score ridiculement bas.
En se prononçant, donc, contre la tenue de ce scrutin, le RCD donne l’air de poursuivre un double objectif. Celui de s’accrocher à la locomotive de la contestation radicale, ce qui constitue l’ultime chance, pour lui, de sauver ce qu’il y a encore à sauver dans ce parti. Cela, d’une part.
D’autre part, tenter d’infiltrer l’aile la plus radicale du mouvement des ârchs afin de l’amener à rompre tout contact avec le FFS. Connaissant la mentalité et les idées qui animent le RCD, le risque est grand de voir éclater des affrontements fratricides entre les partisans de la tenue du scrutin et ses plus farouches adversaires. Il y a fort à craindre, en effet, que le scénario du 30 mai dernier ne se reproduise, avec l’utilisation de contraintes physiques diverses en vue d’empêcher les gens de voter avec cette donne supplémentaire que le FFS sera amené à protéger ses militants, sympathisants, mais aussi tous les citoyens rejetant le diktat des radicaux du mouvement des ârchs, vraisemblablement contrôlés par le parti du docteur Sadi.
Si la Kabylie est menacée d’un nouvel embrasement, plus grave encore que tous ceux qui l’ont précédé, il est certain aussi que le RCD est en train de jouer son ultime carte dans un pathétique combat pour sa survie.

Mohamed ABDOUN